VII. Thérapeutique

En dépit de ce que nous pourrions croire, la médecine de l’époque dispose d’un certain nombre de solutions, plus ou moins efficaces, pour remédier à la douleur. Un des signes de l’intérêt pour la prise en charge de la douleur est la spécialisation technique du vocabulaire : les médecins appellent anodins, du grec an – odunè, « qui supprime la douleur », ce que nous appelons antalgiques.

Elías Montalto - Du difficile usage des narcotiques

Trois catégories d'anodins

  • les anodins curatifs, qui suppriment la cause de la douleur : purgatifs, résection d’une tumeur, etc.

  • les anodins au sens strict, qui apaisent la partie douloureuse : cataplasmes à base de plantes adoucissantes, bains aux herbes, etc.

  • les anodins de dernier recours, qui suppriment la sensibilité :

    • de façon temporaire (par exemple, le temps d’opérer) : compression et ligature des nerfs, application de froid, ingestion de narcotiques comme l’opium et la jusquiame.

    • de façon définitive : section ou cautérisation d’un nerf pour mettre fin à une douleur persistante et potentiellement mortelle. Le chirurgien Ambroise Paré, très soucieux des effets pathogènes de la douleur, écrit qu’« il vaut mieux perdre [un nerf] que la vieAmbroise Paré, Les Œuvres, Paris, Gabriel Buon, 1585, 10e livre, chap. XL, p. 412. ».

L'importance du mode de vie

À côté de cette thérapeutique naturelle, les médecins sont très attentifs à ménager le confort du malade et font des préconisations sur le mode de vie et les passions de l’âme : « éviter la tristesseHenricus Regius, Medicina et praxis medica, editio tertia, Utrecht, Theodori ab Ackersdijck, 1668, « Praxis medica », lib. I, II, p. 7.  » ; se divertir sans excès ; rechercher des sensations propices à l’apaisement (musique, contemplation d’un paysage).

Ambroise Paré - Ménager le confort du patient

Des remèdes parfois dangereux

Dans certains cas, les remèdes employés contre des douleurs persistantes sont douloureux, voire dangereux : on soignait parfois les migraines avec du mercure. Les médecins qui prescrivent de tels remèdes ne s’attardent pas sur la douleur qu’ils peuvent causer – nous disposons en revanche des jugements sévères de leurs confrères et des témoignages révoltés de certains patients.

« Très peu ont guéri, et ce fut au prix de ce danger, de cette douleur, de ces souffrancesUlrich von Hutten, La Vérole et le remède du gaïac, trad. et présenté par B. Gauvin, Paris, Belles Lettres, « Le miroir des humanistes », 2015, p. 255. », écrit l’humaniste Ulrich von Hutten au sujet des traitements de la syphilis. On plaçait les malades dans des étuves pour les faire transpirer. Hutten blâme surtout l’emploi de remèdes inadaptés aux particularités de chaque malade.

Ulrich von Hutten - Souffrir entre des mains incompétentes